SE DÉFENDRE CONTRE UN ABUS DE BIENS SOCIAUX

L’abus de biens sociaux consiste dans le fait, pour les dirigeants de certaines sociétés, d’user des biens de la société à des fins personnelles et contrairement à l’intérêt social. Cette infraction est codifiée aux articles L.241-3 et L.241-6 du Code de commerce.

Une telle infraction peut engendrer des dommages financiers considérables pour une société, de sorte qu’un co-dirigeant – ou toute personne y ayant intérêt – ne peut laisser un autre dirigeant agir de la sorte et générer une diminution du bénéfice de la société, voire la placer dans une situation inextricable.

Il est d’autant plus conseillé au co-dirigeant / associé ou actionnaire ayant découvert de tels agissements de défendre les intérêts de la société que ses propres revenus en seront inévitablement diminués.

Le Ministère public peut aussi se saisir.

Pour être sanctionnés, les faits reprochés doivent remplir certaines conditions, comme suit :

1 / La qualité de dirigeant de l’auteur des faits

Le législateur a pris soin de désigner les personnes pouvant être poursuivies pour abus de biens sociaux pour chaque type de société, lesquelles sont identifiés comme étant notamment les dirigeants de droit suivants :

  • les gérants des sociétés à responsabilité limitée ;

  • les présidents, administrateurs ou directeurs généraux des sociétés anonymes à conseil d’administration ;

  • pour les sociétés anonymes à directoire et conseil de surveillance, les membres du directoire et du conseil de surveillance sont assimilés aux présidents, administrateurs et directeurs généraux des sociétés anonymes avec conseil d’administration ;

  • s’agissant des sociétés qui ont opté pour une dissociation des fonctions de président du conseil d’administration et de directeur général, ces personnes peuvent être auteurs du délit d’abus de biens sociaux. Il en est de même des directeurs généraux délégués, qui se trouvent dans une situation comparable au directeur général adjoint ;

  • les gérants des sociétés en commandite par actions ;

  • le président et les membres du conseil d’administration ou du directoire des sociétés par actions simplifiées.

Outre les dirigeants de droit (ceux officiellement déclarés auprès du Registre du Commerce et des Sociétés territorialement compétent), le législateur a étendu le champ d’application du délit d’abus de biens sociaux aux dirigeants de fait.

Ainsi, les dispositions relatives aux abus de biens sociaux sont applicables à toute personne qui, directement ou par personne interposée, aura en fait exercé la gestion d’une société, sous le couvert ou aux lieu et place de son dirigeant légal.

2 / La nécessité d’un usage de biens sociaux

Le délit d’abus de bien sociaux est légalement constitué par un acte d’usage.

Cela peut consister en une simple utilisation, un usage positif en employant des biens qui sont confiés à l’auteur ou un usage par abstention volontaire (mais non pas par négligence).

Un usage temporaire suffit, tel que la prise en charge par la société de dépenses ponctuelles mais personnelles.

En tout état de cause, l’usage doit concerner des biens sociaux. Par ce terme, le législateur englobe tous les éléments du patrimoine de la société, qu’il s’agisse de biens mobiliers ou de biens immobiliers, de biens mobiliers corporels ou de biens mobiliers incorporels.

Les biens fréquemment concernés sont les fonds sociaux sur lesquels des prélèvements sont opérés au profit du seul dirigeant, mais il peut s’agir du matériel ou des marchandises, des meubles ou des immeubles de la société.

Les biens sont aussi les créances / sommes dues par des tiers, comme les chèques de clients que le dirigeant détournerait.

3 / La nécessité d’agissements contraires à l’intérêt social et à des fins personnelles

Pour être répréhensible, l’usage des biens doit être contraire à l’intérêt social, mais aucune définition de cette exigence n’est précisée par le législateur.

Souvent, la jurisprudence fait référence aux intérêts patrimoniaux de la société.

Par ailleurs, l’usage des biens doit être fait dans l’intérêt personnel du dirigeant. La loi incrimine l’usage fait à des fins personnelles, immédiates, ou pour favoriser une société ou entreprise dans laquelle le dirigeant est intéressé.

L’intérêt personnel peut consister dans un avantage d’ordre matériel ou dans un avantage d’ordre moral.

Pour exemple, sont considérés comme contraires à l’intérêt social les prélèvements effectués sur la caisse sociale par le dirigeant, les rémunérations non autorisées, excessives ou injustifiées, le paiement des dettes personnelles telles que les cotisations retraites (celles qui ne sont pas autorisées bien entendu).

4 / La nécessaire mauvaise foi de l’auteur

L’usage des biens sociaux doit avoir été accompli de mauvaise foi, le dirigeant devant avoir su que l’usage était contraire à l’intérêt de la société. L’intention est nécessaire et elle doit être constatée.

Les délits d’abus de biens sont des délits intentionnels. D’ailleurs, le principe général posé par l’article 121-3 du code pénal est qu’il n’y a « point de crime ou de délit sans intention de le commettre ».

La connaissance de la loi n’a cependant pas à être démontrée. De ce fait, le dirigeant aura du mal à prouver sa bonne foi, la mauvaise foi pouvant être déduite du simple usage des biens ainsi des manœuvres frauduleuses pouvant l’accompagner.

Toutefois, et au regard de la jurisprudence, il semble que les juges ne sont en principe pas autorisés à déduire l’élément moral du délit de la seule matérialité des faits. Il n’en demeure pas moins que la finalité de l’usage induit la conscience d’accomplir un acte contraire à l’intérêt social et, par suite, induit la mauvaise foi et conséquent l’intention coupable.

Lorsqu’un délit d’abus de bien sociaux est constaté, un co-dirigeant peut déposer plainte au nom de la société afin de protéger les intérêts de cette dernière.

L’abus de bien sociaux étant une infraction pénale, votre société peut se constituer partie civile et prétendre à des dommages et intérêts du fait des préjudices soufferts par ses soins, lesquels doivent être chiffrés de manière concrète.

Notre Cabinet vous oriente et vous conseille dans le cadre des démarches à effectuer pour faire valoir vos droits.